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Stress, dépression, anxiété : mauvais pour le coeur !

Le cerveau peut être le pire ennemi du coeur et du système cardio-vasculaire, mais aussi son meilleur allié. Parce que l'état psychologique - stress, anxiété, dépression - joue beaucoup dans la maladie cardiovasculaire, la "psychocardiologie" vient de naître : pour préserver son coeur avant un infarctus du myocarde mais aussi après, pour limiter les récidives et l'aggravation d'une maladie cardiovasculaire existante.

Hélène Joubert Journaliste scientifique
Publié le 16/10/17
Temps de lecture 4 min

La "psychocardiologie", qu'est-ce que c'est ?

Le terme de "psychocardiologie" a émergé vers 2007. Les spécialistes qui s'y intéressent - encouragés par les Sociétés européenne et française de cardiologie - prédisent que d'ici à quelques années, tous les services de cardiologie et de réadaptation cardiaque proposeront des soins de psychocardiologie, sur le modèle déjà bien implanté des soins de psycho-oncologie. Déjà, en 2012, la Société européenne de cardiologie préconisait de prendre en charge les facteurs psychiques du fait d'un risque accru d'insuffisance coronaire et même de son aggravation. L'association médicale américaine du coeur (AHA) considère la dépression comme facteur de risque après un syndrome coronaire aigu (infarctus du myocarde et menaces d'infarctus appelé "angor instable").

30% du risque d'infarctus est dû au stress psychosocial

Le stress psychosocial compte pour près d'un tiers dans le risque d'infarctus. C'est le troisième facteur de risque déterminant, quasiment à égalité avec le tabagisme et l'excès de cholestérol.

Souffrir de stress, de dépression ou d'anxiété augmente le risque de faire un infarctus du myocarde.

A l'inverse, avoir été victime d'un syndrome coronaire aigu accroit le risque d'anxiété ou de dépression et donc augmente le taux de récidive. Un cercle vicieux.

Dr Jean-Pierre Houppe, cardiologue et pionnier de la psychocardiologie en France : « Cette déstabilisation psychologique peut également être déclenchée par de multiples évènements qui jalonnent le parcours d'un patient coronarien : angioplastie (dilatation des artères), pose d'un défibrillateur cardiaque, geste chirurgical et au pire, un arrêt cardiaque "récupéré".

Mais même en consultation de cardiologie en ville, le niveau de souffrance psychique des patients cardiaques est très élevé. Nous avions trouvé que plus de 60 % se plaignaient de stress dont 22 % de façon majeure. 40% souffraient d'anxiété dont 12 % à un niveau élevé et 20 % avaient des signes de dépression dont 7 % de dépression caractérisée. »

La maladie coronaire et artérielle, première victime des facteurs psychologiques

Le coeur de la psychocardiologie est la maladie coronaire. Mais l'on sait désormais que d'autres aspects de la maladie cardiovasculaire vont être impactés, mais de façon moindre comme l'accident vasculaire cérébral, les lésions artérielles périphériques, l'anévrisme de l'aorte abdominale, l'embolie pulmonaire, les troubles du rythme cardiaque et la mort subite.

Dans le cas de la maladie coronaire et de l'infarctus du myocarde, le risque est doublé voire triplé du fait de la présence d'un facteur psychosocial négatif.

Celui-ci revêt plusieurs aspects : psychique, social mais aussi économique. Côté psychisme, il n'y a pas que le trio "stress, anxiété, dépression". La personnalité aussi intervient, notamment celle étiquetée "type D" (tristesse sans être une réelle dépression et inhibition sociale). Le risque est également plus élevé en cas d'hostilité cognitive (les individus "bougons-grognons"), d'épisodes de colère et de phases de désespoir.

Il y trois explications à cet impact négatif des facteurs psychosociaux :

  • au départ, le stress provoque des réactions normales d'adaptation et de survie, mais lorsqu'elles sont utilisées de façon désadaptée, elles agissent par augmentation des risques classiques (tabagisme, mauvaise hygiène de vie, déstabilisation de la pression artérielle et du taux de LDL cholestérol, aggravation d'un diabète etc.). Par exemple dans le diabète, le stress requérant plus d'énergie (et donc de sucre), toute une série de réactions hormonales va entraîner un déséquilibre métabolique, une résistance à l'action bénéfique de l'insuline, une surcharge pondérale et, à terme, une aggravation du diabète.
  • par ailleurs, tous les facteurs psychiques ont un effet direct sur le système cardiovasculaire via des facteurs hormonaux (notamment neuro-cérébraux), inflammatoires et de coagulation. L'action conjuguée des facteurs de risques classiques, des facteurs inflammatoires et de ceux favorisant la coagulation précipitent la survenue et l'évolution de la maladie artérielle.
  • enfin, la souffrance psychologique, surtout après un épisode coronarien, risque de provoquer une diminution de l'observance médicamenteuse et de certains comportements (activité physique, alimentation équilibrée, tabagisme). Le risque de récidive augmente alors.

Trois fois plus de récidives de syndrome coronaire aigu

La prise de conscience d'avoir croisé la mort, le deuil de la vie d'avant, la nécessité d'adaptation est un long parcours qui entraîne potentiellement du stress, de l'anxiété et de la dépression.

De plus, l'annonce du diagnostic et la phase aiguë d'un syndrome coronaire aigu peuvent constituer un vrai traumatisme, tel un syndrome de stress post-traumatique, avec un risque de récidive multiplié par 2,5.

Ce syndrome de stress post-traumatique est présent chez environ chez 20% des patients qui viennent de faire un infarctus du myocarde et chez 30% des opérés du coeur.

Dr Jean-Pierre Houppe : « Lorsque des symptômes de souffrance psychologique et en particulier la dépression persistent dans les mois qui suivent l'accident coronaire, la mortalité est doublée voire triplée (décès par récidives d'infarctus du myocarde, mort subite due à des troubles du rythme, suicide) ».

Comment prendre soin de soi et donc de son cœur ?

Si l'état psychologique retentit et aggrave le pronostic cardiovasculaire, la prise en charge psychologique l'améliore avec une diminution de la mortalité qui irait jusqu'à 30% ! L'effet est encore plus soutenu si l'on y associe une activité physique.

Que faire en pratique ?

En prévention de l'accident et de la maladie coronaire :

  • prendre conscience de sa souffrance psychique.
  • pratiquer la psychologie positive (voir le bon côté des choses, mais surtout se poser la question « quelles sont mes valeurs de vie ? » et s'engager selon ses propres valeurs). Dans l'insuffisance coronaire, elle diminuerait de 20% le risque cardiovasculaire comparé à des gens en apparente bonne santé psychique.
  • prendre le temps de se poser régulièrement en pratiquant des méthodes de relaxation corporelle et respiratoire, de sophrologie, de cohérence cardiaque, de méditation en pleine conscience. Ceci afin de mieux gérer les émotions et l'impact du stress quotidien et diminuer le risque d'anxiété et de dépression.
  • s'astreindre à une activité physique quotidienne.

Après un accident coronaire :

  • prendre conscience de sa souffrance psychologique, soi-même ou avec l'aide de son médecin traitant ou de son cardiologue. S'ils ne sont pas réceptifs, ne pas hésiter à se tourner vers un psychothérapeute.
  • la prise d'antidépresseurs et d'anxiolytiques peut être utile de façon très momentanée. Ils sont cependant beaucoup trop prescrits. Ils améliorent parfois un peu le profil psychologique, mais ne modifient pas l'inflammation associée à la dépression, et ne réduisent donc pas le risque de récidive qui reste multiplié par trois.
  • en cas de syndrome de stress post-traumatique, on peut suivre la méthode EMDR (Désensibilisation et Retraitement par les Mouvements Oculaires).
  • d'autres psychothérapies peuvent être utiles comme l'hypnothérapie, la thérapie d'acceptation et d'engagement ou la thérapie cognitive et comportementale. Cette dernière affiche le plus de preuves d'un bénéfice sur la réduction du risque cardiovasculaire.
  • pratiquer une activité physique quotidienne.

Source : e-santé

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