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Les femmes, victimes de choix de certaines maladies

Publié le 20/02/18

Parfois, la maladie est sexiste. Les femmes ont tendance à souffrir de certains maux plus souvent que les hommes. Une femme avertie en vaut deux. Tour d’horizon.

Les femmes, trois fois plus touchées par le Syndrome de l’Intestin Irritable

En France, le Syndrome de l’Intestin Irritable (SII) touche trois femmes pour un homme (1). D’ailleurs, quel que soit le type de trouble fonctionnel intestinal (constipation, globus/boule dans la gorge, dysphagies/problème de déglutition, ballonnements, douleurs abdominales fonctionnelles), les femmes souffrent systématiquement plus souvent que les hommes en Europe et en Amérique du Nord. Ce n’est pas le cas en Afrique, Asie du Sud et Amérique du Sud. Aucune explication sur cette particularité occidentale n’est réellement satisfaisante.

Dr Pauline Jouët, gastro-entérologue, service d’hépato-gastro-entérologie Hôpital Ambroise Paré (Boulogne-Billancourt) : « Temps de transit colique plus lent chez la femme, hypersensibilité viscérale plus importante, femmes plus sujettes à conserver des symptômes séquellaires de gastro-entérite ou « syndrome de l’intestin irritable post-infectieux »… sont parmi les explications avancées pour expliquer la prédominance féminine. Il faut aussi savoir que les femmes ont par ailleurs une tendance à plus facilement consulter pour leurs symptômes que les hommes. La femme pourrait être aussi plus vulnérable aux troubles fonctionnels intestinaux du fait de son statut hormonal, mais rien n’est bien démontré. La piste génétique est en cours d’exploration ».

La constipation, une affaire de femmes

La constipation chronique concerne plus d’un tiers de la population française mais surtout trois femmes pour un homme. Un quart des hommes et un tiers des femmes après 65 ans sont constipés.

Dr Jean-Paul Vove, gastro-entérologue, proctologue et sexologue (Bordeaux) : « Les femmes se retiennent peut-être plus d’aller à la selle, leur ceinture abdominale est moins puissante, le pelvis a été affaibli par les grossesses… les hypothèses sont variées. Néanmoins, à ce jour, les essais ont échoué à démontrer de façon formelle le rôle des variations hormonales dans la constipation chez la femme (2) ».

Un fibromyalgique sur dix est une femme

La fibromyalgie est un syndrome douloureux chronique assez fréquent (1,6% de la population) et féminin. Il associe, entre autres, fatigue chronique, troubles du sommeil, céphalées de tension, troubles fonctionnels digestifs etc. La fibromyalgie est jusqu’à dix fois plus fréquente chez la femme.

Dr Julien Guérin, co-coordinateur de l’enquête « La fibromyalgie dans la vraie vie » (3), Centre d’évaluation et de traitement de la douleur (Hôpitaux Saint Antoine et Cochin, Paris) : « Nous avons tenté de dresser le portrait robot de la personne fibromylagique (3). Sans surprise, les femmes sont majoritairement atteintes (92%), âgées en moyenne de 48 ans, avec une légère tendance au surpoids. Les fibromyalgiques ont en général des maladies associées (comorbidités). L’enquête le confirme avec en tête l’arthrose, loin devant l’endométriose ou l’hypothyroïdie. Sur le plan psychologique, des troubles cognitifs, une anxiété ou une dépression sont retrouvés dans un cas sur deux ».

Les femmes ont plus souvent la migraine

La migraine est trois fois plus fréquente chez la femme : 15 à 18% des femmes contre 6% des hommes. Les hormones sont impliquées ; les changements hormonaux (grossesse, ménopause) jouant sur le développement de la crise de migraine. Les menstruations (règles) sont parmi les facteurs déclencheurs les plus fréquents, du fait de la chute du niveau d'estrogènes prémenstruel. Plus cet effondrement oestrogénique est rapide, plus le risque de souffrir de migraine serait important (4).

Les femmes, plus durement touchées par les complications du diabète

Les femmes, si elles sont moins souvent diabétiques de type 2, sont néanmoins plus touchées par ses complications. Le sur-risque masculin de diabète de type 2 est non négligeable puisqu’il est, en métropole du moins, de 44,5% après 40 ans (5). En revanche, les complications vasculaires et rénales du diabète de type 2 (DT2) sont plus fréquentes chez les femmes.

Pr Patrick Ritz, service d’Endocrinologie, maladies métaboliques et nutrition de l’Hôpital Larrey (Toulouse) : « Le risque relatif de maladie cardiovasculaire chez les femmes diabétiques de type 2 est de 3,5 comparé aux femmes non diabétiques alors qu’il est de 2,1 chez l’homme. De plus, la prévalence de l’hypertension artérielle est plus forte chez les femmes diabétiques (6-7) ».

Comment l’expliquer ? Tout d’abord, leurs facteurs de risque sont moins bien contrôlés : leur indice de masse corporelle est plus élevé, leur control tensionnel moins efficace, et elles pratiquent moins souvent une activité physique. Le traitement est aussi moins optimal, tout comme la surveillance sur le plan rénal et cardiovasculaire.

Les femmes, plus touchées par la BPCO

Les femmes et les jeunes sont de plus en plus affectés par la bronchopneumopathie chronique obstructive. BPCO, ces quatre lettres désignent une maladie grave des bronches due à 80% au tabagisme et qui peut conduire à l’insuffisance respiratoire. On sait maintenant depuis 2013, année de la publication d’une vaste étude américaine regroupant près de 500 000 personnes (Nurse Health Study), non seulement que la BPCO continue de progresser, mais que les femmes sont de plus en plus concernées et les malades de plus en plus jeunes.

La dépression, deux fois plus fréquente chez la femme

La dépression est deux fois plus fréquente chez la femme avec un homme sur dix concernés contre une femme sur cinq. Les hormones expliqueraient cette plus forte prévalence lors de certains évènements de vie de la femme (ménopause, accouchement etc.). Les hormones les plus psychoactives sont les estrogènes et la progestérone mais un neurotransmetteur – la sérotonine – pourrait aussi expliquer le phénomène. Un déficit sérotoninergique est retrouvé dans les états dépressifs. Or, la synthèse de sérotonine est plus élevée dans le cerveau masculin. Les dépressions féminines sont aussi peut être mieux dépistées, car elles consultent un médecin en général plus facilement, ce constat étant retrouvé dans de nombreuses pathologies.

Les femmes, plus de deux fois plus de calculs biliaires

La lithiase biliaire, ou calcul de la vésicule, affecte de deux à trois fois plus de femmes que d’hommes. La formation de calculs à l’intérieur de la vésicule biliaire touche 10 % à 15 % des hommes et 25 % à 30 % des femmes. Cette différence, cependant, s’atténue après 70 ans. Les calculs dits « cholestéroliques » sont favorisés par les facteurs qui vont entraîner une augmentation de la concentration biliaire en cholestérol. Il ressort que le sexe féminin est plus susceptible de fabriquer ce type de calcul.

MICI et maladies auto-immunes, désavantage aux femmes

Selon les chiffres récents en France, 56 % de femmes et 44% d'hommes souffrent de maladies chroniques inflammatoires de l’intestin (maladie de Crohn, rectocolite hémorragique). Globalement, les femmes sont plus susceptibles que les hommes d'être atteintes de maladies auto-immunes telles que la sclérose en plaques, l’arthrite rhumatoïde, la thyroïdite, le lupus, ou la myasthénie (maladie neuromusculaire). Ces maladies résultent du dysfonctionnement du système immunitaire qui s'attaque à l'organisme lui-même. Une équipe française a probablement touché du doigt l’une des causes. Le thymus est l’organe où les lymphocytes T, les cellules du système immunitaire qui détruisent les intrus, apprennent à reconnaître le soi pour ne pas l'attaquer. A cause de taux élevés des estrogènes chez la femme à partir de la puberté, une protéine (AIRE) présente dans les cellules de ce thymus serait synthétisée en quantité moindre, augmentant la susceptibilité aux maladies auto-immune.

(1) Aliment Pharmacol Ther. 2010 Sep;32(6):738-55 ; (2) Drugs. 2013 Nov;73(17):1935-50 ; (3) Enquête auto-déclarative développée par l’Association française de lutte antirhumatismale et Fibromyalgie SOS ; (4) Dr Jelena Pavlovic et al. Neurology 87 July 5, 2016 ; (5) chiffres 2007 de l’InVS (BEH 42-43) ; (6) Endocrine, Metabolic & Immune Disorders-Drug Targets Vol12, N 2, June 2012, pp. 179-196 (18) ; (7) Gend Med 2006 Jun;3(2):131-58; (8) Sonia Berrih-Aknin et al. J Clin Invest. 2016;126(4):1525-1537

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