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Anévrisme de l’aorte abdominale, une première française

Publié le 12/09/17

L’anévrisme de l’aorte abdominale… un terme complexe pour désigner une maladie relativement fréquente : entre 5 à 10 % des hommes de plus de 60 ans sont opérés, sans quoi l’issue peut être fatale. Des médecins français ont réussit l’exploit de concevoir une prothèse « sur mesure » qui permettra de sauver de nombreuses vies.

Anévrisme de l’aorte abdominale, une maladie de plus en plus courante

La plus grosse artère du corps -l’aorte- part du cœur, descend dans le thorax jusqu’à l’abdomen ou elle irrigue chaque jambe. On parle d’anévrisme aortique abdominal lorsqu’une partie de l’aorte, plus précisément celle située sous le rein et qui traverse l’abdomen, se dilate. Ce gonflement anormal, plus ou moins rapide et la plupart du temps sans aucun symptôme, rend l’aorte vulnérable. Une pression artérielle même normale peut alors la faire céder ; c’est la rupture, fatale, par hémorragie interne massive dans plus de 80% des cas.
Les hommes sont bien plus touchés que les femmes. Si les anévrismes sont plus rares chez elles, ils sont cependant plus graves et avec une forte composante génétique.
Inflammation, hérédité, plaques d’athérome (dépôts graisseux) sur la paroi des artères… la cause de l’anévrisme est souvent incertaine. Cependant, des facteurs de risque ont été identifiés comme un âge au-delà de 50 ans, le tabagisme, l’hypertension, les antécédents familiaux et un taux de cholestérol élevé.

Pr Fabien Koskas, chef de service de chirurgie vasculaire à la Pitié Salpetrière (Paris) : « L’anévrisme de l’aorte est une maladie de plus en plus fréquemment observée du fait du vieillissement de la population. En effet, sur le plan mécanique cela traduit une sorte d’usure ou de fatigue de la paroi artérielle. Cette dernière est mise à rude épreuve lorsqu’elle doit résister aux pulsations de la pression sanguine. Or l’élasticité de l’aorte est assurée par des molécules (élastine par exemple) qui ne sont pas de la même qualité chez tout le monde. Certains ne feront jamais d’anévrisme, d’autres en feront tôt dans leur vie. Lorsque le processus est enclenché, l’évolution est inexorable. Le diamètre de l’anévrisme croît en deux phases, lente (jusqu’à 45 mm) puis plus rapide. Le risque de complications, au premier rang desquelles la rupture, survient dès un diamètre de 50mm avec un risque compris entre 5 et 13% dans l’année. A 60 mm de diamètre, le risque de rupture est de 30 à 40% dans l’année. D’où l’option chirurgicale privilégiée dès un diamètre dépassant 50 mm, du moins en France où la chirurgie est facilement accessible ».

Des implants pour stopper la progression de l’anévrisme

Jusqu’en 1950, personne ne savait traiter cette maladie. Des greffes de segments d’aorte ont été tentées puis des matériaux synthétiques les ont remplacés, de plus en plus fiables. Ces opérations étaient uniquement réalisées sur des patients qui pouvaient supporter des chirurgies « ouvertes », jusqu’au début des années 90. Pour cette raison, il y avait entre 20 et 60% de laissés-pour-compte.

Pr Koskas, concepteur d’une prothèse novatrice : « En 1991, l’idée de combiner des prothèses synthétiques avec des stents (squelettes métalliques déjà utilisés pour maintenir le passage du sang à l’intérieur des artères du cœur et recouverts d’une enveloppe de polyester) a ouvert la porte au traitement de l’anévrisme sans ouvrir le thorax. L’« endoprothèse vasculaire » est introduite par les vaisseaux sanguins. De nombreuses équipes dont la mienne ont testé cette technique. Mais nous avons obtenu de très bons résultats car notre stent était plus adapté et résistant. Les premiers essais conduits chez des malades à un stade sévère nous ont impressionnés : les personnes ont pu survivre jusqu’à 10 ans après l’opération* ».

Une prothèse « sur-mesure »

L’équipe du Pr Koskas a pu déterminer le facteur clé de la réussite de cette opération : plus l’implant moule la cavité de l’anévrisme où circule le sang, plus le taux de réussite est élevé. En effet, seule une prothèse « sur-mesure » pour assurer un maximum d’étanchéité aux différents collets de l’anévrisme limite les fuites. Or, ce sont les fuites qui participent à la croissance de l’anévrisme. Un stent parfaitement ajusté permet de ce fait de traiter plus de 85% des malades souffrant d’anévrisme de l’aorte sous-rénale.

Pr Koskas : « En pratique, un modèle tridimensionnel de la cavité circulante de l’anévrisme est construit à partir du scanner du malade. Les endoprothèses possèdent alors les caractéristiques géométriques de la cavité de l’anévrisme. Au départ, elles étaient fabriquées de manière artisanale à l’hôpital La Salpêtrière par les chirurgiens. Nous avons dû depuis nous tourner vers une approche industrielle* pour que cela puisse bénéficier au plus grand nombre. Nous mettons en ce moment au point un procédé de construction automatique à partir des images du scanner, sorte d’impression 3D ».

Près de 85% des malades peuvent être opérés

Les résultats de ces endoprothèses « sur mesure » sont très satisfaisants, avec un taux de fuites résiduel de 5%, c’est à dire bien plus faible que les endoprothèses standard du marché (15-20% de fuites en moyenne)**. 85% des malades peuvent ainsi être opérés contre 50% avec les endoprothèses standard. Le taux de décès lié à l’implant « sur-mesure » est faible, de l’ordre de 5% à 10 ans contre 40% à 3 mois pour les prothèses standard.

Le marquage CE vient d’être obtenu (septembre 2016) et dans les prochains mois, tous les hôpitaux français pourront soigner les patients qui ne sont pas éligibles aux prothèses standard grâce à ces prothèses « sur-mesure ». Le praticien commandera une endoprothèses aux dimensions spécifiques du malade ou communiquera simplement son scanner et recevra en retour l’implant prêt à l’emploi. Les besoins annuels sont estimés jusqu’à 10 000 endoprothèses sur-mesure, rien que pour les anévrismes les plus complexes. Autant de vies supplémentaires sauvées.

Pr Fabien Koskas : « L’idée est aussi de fournir cette technologie à un coût minimal, afin d’en faire profiter les pays émergents ; le prix doit encore être fixé avec la commission de la transparence de la Haute Autorité en Santé mais il pourrait coûter moins de 5 000 euros contre les 8 à 10 000 aujourd’hui pour les modules d’une endoprothèse aortique standard. Du « sur-mesure » à portée du plus grand nombre ».

Sur leur lancée, les praticiens travaillent aujourd’hui au développement d’une première endoprothèse de la crosse aortique.

*L’endoprothèse Customi® est fabriquée par la société Endonov
** Validé par un essai clinique sur 455 patients sur 9 centres hospitaliers, de 2001 à 2009

D’après un entretien avec le Pr Fabien Koskas, chef de service de chirurgie vasculaire à la Pitié Salpetrière (Paris).

 

 

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