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La dénutrition, une maladie silencieuse que l'on peut éviter

La dénutrition est une maladie silencieuse, qui touche particulièrement les personnes âgées, entraînant d’importantes conséquences sur la santé. Elle donne lieu à une Semaine nationale de lutte contre la dénutrition, dont la 3e édition aura lieu en France du 18 au 25 novembre. Il est possible de mieux dépister cette maladie et la traiter, à condition d’y mettre les moyens nécessaires. Décryptage avec Eric Fontaine, médecin-nutritionniste au CHU de Grenoble, fondateur et président du Collectif de lutte contre la dénutrition.

Publié le 25/10/22
Temps de lecture 5 min

En France, environ deux millions de personnes sont dénutries, selon le Collectif de lutte contre la dénutrition. Si la maladie touche toutes les classes d’âge, les seniors en perte d’autonomie sont en première ligne. Près de 400 000 personnes âgées vivant à domicile et 270 000 résidents en Ephad ont ainsi une alimentation quotidienne insuffisante pour couvrir leurs besoins nutritionnels. Plusieurs facteurs les empêchent de bien manger : perte d’appétit et du goût, problèmes de déglutition ou dentaires, troubles cognitifs, isolement social, dépression, régimes sans sel ni sucre, traitements médicamenteux, polypathologies, etc. « La dénutrition n’est pas un symptôme, mais une maladie à part entière ! Elle est pernicieuse car elle se cache ou accompagne souvent d’autres pathologies et n'est pas toujours bien diagnostiquée », s’alarme Eric Fontaine, médecin-nutritionniste au CHU de Grenoble.

La dénutrition : une maladie « facile » à repérer

Sur le papier, diagnostiquer la dénutrition est pourtant relativement simple. « Quelqu’un qui maigrit et qui ne le fait pas exprès est par définition en train de se dénutrir, confirme Eric Fontaine. Il faut donc peser les personnes âgées. C’est obligatoire, mais ce n’est pas souvent réalisé ». En effet, aujourd’hui, familles comme professionnels de santé passent trop souvent à côté de la maladie. « On dispose dans l’absolu de tous les savoirs et toutes les solutions pour empêcher cela. Nous savons dépister et traiter la dénutrition chez les personnes âgées, mais rien ou trop peu n’est fait, faute de moyens financiers, humains et d’une prise de conscience citoyenne », tance Eric Fontaine.

Concrètement, une perte de poids supérieure à 5 % en un mois, 10 % en six mois, ou un Indice de Masse Corporelle (IMC) inférieur à 22 sont autant de signaux d’alerte reconnus par la Haute Autorité de Santé. A domicile, les proches d’un senior doivent être vigilants si celui-ci flotte dans ses vêtements, s’il ne termine pas son repas ou si le frigo reste vide pendant plusieurs jours.

Car loin d’être anodins, ces kilos perdus affaiblissent les défenses immunitaires de l’organisme et augmentent le risque de complications infectieuses. Plus vulnérables, moins fortes, les personnes âgées chutent plus fréquemment, les fractures et les hospitalisations sont en hausse. « C’est souvent un premier pas vers la dépendance », souligne le spécialiste.

La dénutrition en chiffres

En France, on estime que 1 patient hospitalisé sur 3 est dénutri. Mais aussi :

  • Entre 4 et 10 % des personnes âgées vivant à domicile et environ 30 % des résidents en Ehpad ;
  • 1 enfant hospitalisé sur 10 ;
  • 40 % des malades atteints d’un cancer ;
  • 40 % des malades atteints de la maladie d’Alzheimer ;
  • 40 % des personnes âgées hospitalisées.

Une semaine spéciale pour alerter le grand public

Améliorer la prévention, le dépistage et la prise en charge des personnes dénutries constitue donc un enjeu de santé publique. C’est le sens du combat que mène le Collectif de lutte contre la dénutrition. Depuis 2016, ses membres – médecins, associations de patients, aidants, chercheurs, élus, etc. – portent de nombreuses revendications. Parmi celles-ci figure le recrutement de personnels soignants supplémentaires auprès des patients à l’hôpital et des résidents en Ehpad. Autres attentes, celles d’une présence renforcée de nutritionnistes, la formation allongée d’un an pour les diététiciens, des campagnes nationales de sensibilisation ou encore la reconnaissance par la Sécurité sociale des actes des diététiciens afin qu’ils soient remboursés. « Mais pour le moment, nous n’avons rien obtenu », concède le docteur Fontaine.

Pour inverser la tendance, le Collectif anime, pour la troisième année consécutive, la « Semaine nationale de lutte contre la dénutrition » du 18 au 25 novembre 2022. Objectif ?  Mieux faire connaître cette maladie aux citoyens comme aux professionnels de santé pour qu’ils comprennent que dépistée précocement, la dénutrition peut être vaincue.

Au menu : des animations culinaires en Ehpad, des ateliers et des rendez-vous orchestrés par les professionnels de santé sous la forme de colloques, des actions de sensibilisation au dépistage précoce par la pesée, de la formation des personnels soignants et aidant à domicile, des ateliers d’enrichissement de l’alimentation, etc. L’an passé, plus de 10 000 actions avaient été organisées partout en France. « Cette semaine est incontestablement une première étape dans la construction du parcours de soins des personnes souffrant de dénutrition », ambitionne Eric Fontaine.

Changer les habitudes alimentaires pour lutter contre la dénutrition

Plusieurs leviers agissent sur la perte de poids. « Le premier consiste à inciter – et non à forcer – les seniors dénutris à consommer des plats plus gras et sucrés, à rehausser le goût avec des épices, des aromates, afin de retrouver le plaisir de manger », conseille Eric Fontaine. Il peut aussi s’agir d’augmenter la fréquence des prises alimentaires pour atteindre quatre ou cinq repas par jour, grâce à des collations. Autre option, la prescription par un médecin de compléments nutritionnels riches en calories et protéines, en plus des repas, de préférence la soir.

L’activité physique adaptée est essentielle pour renforcer la masse musculaire : alimenter une personne dénutrie ne suffit pas si l’on ne stimule pas le muscle. Autant de gestes faciles à mettre en œuvre, mais qui exigent du temps, de la pédagogie et donc de la présence humaine pour bien accompagner les patients. L’enjeu est d’envergure, insiste Eric Fontaine : « Des études scientifiques montrent que ces recommandations permettent de diminuer la mortalité des patients dénutris à l’hôpital sur trente jours, de baisser les hospitalisations. » Un message que le médecin répètera à l’envie en novembre prochain.

Pour en savoir plus

Le Collectif de lutte contre la dénutrition formule 14 propositions.

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