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Syndrome de l’intestin irritable : un profil psychologique particulier

Troubles fonctionnels gastro-intestinaux et troubles de la personnalité sont liés. Récemment, les recherches se sont affinées : les personnes ayant un syndrome de l'intestin irritable ont des traits psychologiques particuliers. Mais au sein même des diverses manifestations cliniques de ce syndrome, les caractéristiques psychologiques diffèrent. Quelles sont-elles ?

Marion Garteiser Journaliste santé
Publié le 25/02/22
Temps de lecture 5 min

Syndrome de l’intestin irritable et profil psychologique, quel rapport ?

Des profils psychologiques particuliers sont fréquemment retrouvés chez les patients souffrant de troubles fonctionnels digestifs. Par rapport aux autres troubles fonctionnels gastro-intestinaux comme la dyspepsie (troubles de la digestion) ou la constipation, les patients souffrant par exemple de syndrome de l'intestin irritable (SII) ont des caractéristiques psychologiques spécifiques.

Le Dr Michel Bouchoucha, service de gastro-entérologie de l’Hôpital Avicenne (Bobigny) : «Cette association entre les troubles fonctionnels gastro-intestinaux et la personnalité est expliquée par un modèle dit "bio-psycho-social". Celui-ci prend en compte l'interaction entre les facteurs liés à l'histoire du patient (génétique, culture, environnement comme les infections, les traumatismes, les comportements des parents?), et les facteurs psychosociaux (stress, personnalité, état psychologique, moyens d’adaptation à un stress, statut social). Les interactions entre le système nerveux central et le système nerveux intestinal (entérique) se font dans les deux sens.

Cela entraîne dans l'ensemble du tube digestif des troubles de la motricité et de la sensibilité des viscères mais aussi une modification des réponses immunitaires, voire une inflammation, une perturbation du microbiote intestinal et de l'alimentation. Ces anomalies sont responsables des différentes présentations des troubles digestifs (symptômes, sévérité, comportement réactionnel) et des réponses de la personne (gêne occasionnée, qualité de vie) ».

Intestin irritable : plus d’anxiété et moins d’estime de soi

Une étude française récente (2016) * dirigée par le Dr Michel Bouchoucha éclaire sur les caractéristiques psychologiques des personnes qui souffrent du syndrome de l'intestin irritable. Par comparaison avec celles qui présentent d'autres troubles fonctionnels gastro-intestinaux, celles avec un syndrome de l'intestin irritable ont des scores plus élevés sur l’ensemble des échelles des symptômes :

  • Trois échelles cliniques : celles de "déviation psychotique" (comportement antisocial), d’"introversion sociale" et de "masculinité/féminité" (un score élevé caractérise des personnes n'apparaissant pas dans le rôle traditionnel attribué aux hommes ou aux femmes, par exemple les femmes compétitives, agressives et dominatrices et les hommes empathiques et tolérants). Ce sont fréquemment des personnes qui aiment la solitude et ont une préférence pour la socialisation avec des petits groupes plutôt que des grands groupes.
  • Trois échelles de contenu : "problème de santé", "bizarreries" et "faible estime de soi".

Ces personnes se plaignent de troubles fréquents et variés difficiles à rattacher à des signes objectifs.

  • Trois échelles complémentaires : "anxiété", "inadaptation scolaire" et "stress post-traumatique".

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Ces personnes anxieuses ont fréquemment présenté des difficultés scolaires pouvant être associées à de grands chocs antérieurs. Dr Bouchoucha : «Syndrome de l’intestin irritable, cause ou conséquence de ces caractéristiques psychologiques ? Les interactions multiples entre les troubles, leur vécu et la prise en compte de ces signes par l'individu montrent l'intrication des causes et des conséquences. Cependant, certains traumatismes, comme les abus sexuels, sont fréquemment associés aux troubles fonctionnels gastro-intestinaux».

L’intestin irritable, le profil psychologique varie selon les symptômes

Les manifestations du syndrome de l’intestin irritable diffèrent selon quatre tableaux cliniques : avec constipation, avec diarrhée, mixte (alternance diarrhée/constipation) et non spécifique. Par comparaison aux personnes avec un syndrome de l’intestin irritable non spécifique, ceux avec une forme "constipation" se caractérisent par une augmentation de la dépression et une diminution du rôle de genre masculin. Ceux avec la forme "diarrhée" ont un score d'anxiété et un score de pratique antisociale plus élevés. Enfin, ceux avec une forme mixte ont un score plus élevé d'hypocondrie et d'inadaptation scolaire.

Quelles conséquences pratiques ?

Déjà, dans la dernière version des critères diagnostics internationaux des troubles fonctionnels gastro-intestinaux (dite Rome IV 2016), la "douleur abdominale fonctionnelle" est devenue "douleur gastro-intestinale à médiation centrale". Cela signifie que l’on prend désormais en compte le rôle du cerveau et l’importance du profil et de l’état psychologiques dans la survenue des maladies gastro-intestinales. De plus, des examens de plus en plus poussés permettent de rechercher une réelle cause.

On ne peut plus se contenter de diagnostiquer un syndrome de l'intestin irritable sans avoir éliminé tout une série de pathologies organiques potentielles (maladie céliaque, pullulation microbienne, intolérance au lactose ou au fructose, malabsorption des sels biliaires etc.). Une fois que le diagnostic de syndrome de l'intestin irritable est posé, la prise en charge psychologique est essentielle, qui peut aider à diminuer l’ensemble des symptômes. Celle-ci est complémentaire, en fonction du type de maladie, au traitement des troubles de la motricité du tube digestif (médicaments laxatifs ou antidiarrhéiques) et de la sensibilité (médicaments antispasmodiques).

La prise en charge pharmacologique des troubles psychologiques permet d'améliorer certains patients par utilisation d'antidépresseurs. Dr Michel Bouchoucha : «Notre groupe de recherche a montré que l'ostéopathie diminuait l'importance des ballonnements et des douleurs abdominales chez les patients souffrant de syndrome de l'intestin irritable. Une étude française permettra de valider cet effet en 2017. D'autres équipes, principalement en Angleterre, proposent l'hypnothérapie, avec là-aussi de bons résultats fonctionnels. Les autres thérapies alternatives ont peu été évaluées jusqu’alors».

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