Quand une école primaire et une maison de retraite font toit commun
En Indre-et-Loire, une quarantaine d’élèves cohabitent en toute harmonie avec les résidents d’une maison de retraite intergénérationnelle. Reportage.
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Un samedi sur deux à Dijon, des personnes souffrant de la maladie d’Alzheimer et leurs aidants se réunissent pour danser le tango. Une façon de retrouver une complicité et de poser un autre regard sur son proche malade. Mais pas seulement. Cette danse de salon, née en Argentine il y a plus d’un siècle, pourrait aussi freiner les symptômes de la maladie.
« Pas côté vers le centre de la pièce, deux pas en avant, pas côté vers l’extérieur de la pièce, changement de poids sur place, petit pas en arrière, et après on recommence ! » Claire Simon, la professeure de tango qui, ce jour-là, anime l’atelier avec Michel Bullier, l’accordéoniste, rappelle les mouvements à effectuer. Tandis que résonnent les premières notes de musique, les corps se mettent en branle. Sur la piste, une dizaine de couples évoluent au rythme de l’accordéon. Les pas ne sont pas toujours bien assurés, les gestes parfois un peu maladroits. « On a l’impression que c’est tout simple, mais en fait ce n’est pas si évident », s’excuserait presque Claude, une élégante octogénaire qui assiste à son deuxième cours. Mais qu’importe. Ici, on ne cherche pas la performance : on danse pour ne pas oublier.
Cela fait bientôt cinq ans que l’antenne de Côte d’Or de l’association France Alzheimer propose des ateliers de tango thérapeutique à Chenôve, dans l’agglomération de Dijon, en partenariat avec l’université de Bourgogne. Un samedi sur deux, durant une heure trente, malades et aidants se retrouvent pour danser et partager un moment d’évasion dans une atmosphère chaleureuse et bienveillante. « Ce n’est pas un cours de tango classique comme je peux en donner ailleurs, explique Claire Simon. C’est du tango qui prend en compte les besoins spécifiques de chacun et qui est davantage axé sur le bien-être que sur la perfection des mouvements. »
« À raison de quarante-cinq minutes de tango par semaine, on constate en trois mois des effets bénéfiques. »
France Mourey, chercheuse à l’Inserm
Pour Michel, c’est une première et, visiblement, la danse n’est pas sa tasse de thé. Assis sur une chaise, cet ancien prothésiste dentaire sourit avec bonhommie en regardant son épouse enchaîner les pas avec une bénévole de l’association. « J’accompagne ma femme, sinon elle ne vient pas, explique-t-il comme pour justifier sa présence, mais je n’ai jamais aimé aller danser. » Quand on lui demande depuis combien de temps ils sont mariés, c’est vers Hélène, son épouse, qu’il se tourne : « Ça fait combien de temps encore ? » « Soixante-trois ans », lui répond-t-elle, avant de le prendre par la main pour l’entraîner à son tour sur la piste : « Allez viens, ça va te faire du bien ! »
Le tango fait du bien, c’est un fait. De nombreuses études en témoignent. Sa pratique régulière améliore les capacités physiques, favorise la coordination et stimule les fonctions cognitives : il faut mémoriser les séquences, rester attentif aux mouvements de son partenaire, se déplacer dans l’espace, suivre le rythme de la musique… Autant de bienfaits pour les personnes atteintes d’une maladie d’Alzheimer ou d’un trouble apparenté. Mais les vertus du tango ne s’arrêtent pas là.
« Les personnes qui souffrent de pathologies dites neuro-évolutives éprouvent des troubles de l’équilibre qui les exposent deux fois plus aux chutes que les gens du même âge, indique France Mourey, professeure émérite à l’université de Bourgogne et chercheuse à l’Inserm, qui coordonne les ateliers. À raison de quarante-cinq minutes de tango par semaine, on constate en trois mois des effets bénéfiques sur la vitesse de marche, l’équilibre et la qualité de vie. » Au fil des séances, les malades apprennent ainsi à se réapproprier certains gestes oubliés : se balancer d’une jambe sur l’autre, faire un pas en arrière ou réaliser un demi-tour…
Le tango peut également faire ressurgir des souvenirs, assure la chercheuse, « des souvenirs de musique, des souvenirs de chant, des souvenirs de situations dans lesquelles on a dansé, dans lesquelles on a aimé, dans lesquelles on a passé des moments heureux. Sans oublier que le tango amène du plaisir, ce qui est aussi extrêmement important ! ».
Fidèle à sa raison d’être, la Fondation d’entreprise La Mutuelle Générale a apporté son soutien aux deux premières éditions de Memorun, la course solidaire organisée par l’association France Alzheimer. Lancé en 2023, cet événement sportif se tient chaque année à Vincennes, à l’occasion de la Journée mondiale Alzheimer, le 21 septembre. Le partenariat s’est décliné autour de deux axes : un appui financier de la Fondation afin de faire grandir la mobilisation contre la maladie d’Alzheimer et soutenir la recherche. Mais aussi le soutien et l’implication des collaborateurs de La Mutuelle Générale, qui ont participé au challenge de course à pied. En 2024, Memorun a réuni plus de 3 300 participants et attiré quelque 5 000 visiteurs. La prochaine édition se déroulera les 20 et 21 septembre 2025. La Fondation d’entreprise La Mutuelle Générale continuera, quant à elle, de se tenir aux côtés de France Alzheimer, dans le cadre d’un partenariat renouvelé.
Au-delà de ces bénéfices, les ateliers permettent de rompre la solitude dans laquelle la maladie d’Alzheimer plonge souvent les patients et leurs aidants. « La maladie vous isole. Les amis ont tendance à s’éloigner. Avec le temps, on finit par vivre un peu en autarcie, on ne bouge plus, on reste à la maison », raconte Claude, un grand gaillard à la carrure athlétique dans les bras duquel son épouse, Gabriella, paraît toute frêle. « Les ateliers de tango, poursuit-il, nous permettent de voir du monde, de rencontrer tout un tas de personnes qui ont les mêmes soucis, les mêmes problèmes que nous et avec lesquels on peut échanger. »
« C’est important de ne pas s’enfermer », confirme Clémence, qui fréquente l’atelier depuis deux ans avec sa compagne, Andrée. « Ça nous donne une bouffée d’air frais, parce que quand on est toutes les deux à la maison, c’est plus compliqué, plus tendu. »
« Allez, vous pouvez changer de partenaire ! », lance Claire Simon aux danseurs. « Et rappelez-vous que le tango, c’est plus de pas avant, et exceptionnellement un pas de côté, alors que nos habitudes de bal musette, c’est plutôt l’inverse. Au tango, on a vraiment l’idée d’avancer… » Sur la piste, de nouveaux duos se forment. Michel, lui, a préféré se rasseoir. « Il faut compter les pas pour faire les mouvements, ça le perturbe, explique Hélène, mais il n’a pas si mal dansé. » Michel secoue la tête en souriant : « Non, non, non, absolument pas, je ne suis pas content de moi. » Reviendra-t-il quand même dans deux semaines ? « Bien sûr ! » Michel marque un temps, puis ajoute, l’œil malicieux : « Pour faire plaisir à ma femme. »
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