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Accès aux soins pour les femmes en situation de précarité : des initiatives encore insuffisantes

Selon la définition de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), « la santé est un état de total bien-être physique, psychologique et social ». Or, en France comme dans de très nombreux pays, les femmes les plus vulnérables ne peuvent aspirer à cet état, faute d’accès aux soins équivalent à celui des hommes. Comment expliquer leurs difficultés ? Comment développer une prise de conscience sociétale sur cette inégalité liée au genre ? Quelles solutions proposer ? Décryptage.  

Doctopress
Publié le 06/03/23
Temps de lecture 4 min

Une majorité de femmes précaires 

Selon une étude 2021 du ministère chargé de l’Égalité entre les hommes et les femmes, de la diversité et de l’égalité des chances, 53 % des personnes en situation de précarité et 57 % des bénéficiaires du RSA sont des femmes. Elles constituent aussi l’écrasante majorité des familles monoparentales, dont un tiers vit sous le seuil de pauvreté. Déjà, en 2017, une étude du haut conseil à l’égalité (HCE) se penchait sur le cas des femmes « hors radar » : les femmes représentent 64 % des personnes reportant les soins ou y renonçant. 

Dans son rapport « l’accès à la santé des femmes en situation de précarité », l’Association des Droits Humains de la Sorbonne rapporte que « La France est l’un des pays où les inégalités sociales de santé sont les plus fortes. » Cela s’explique notamment par un non recours aux aides financières jugées trop complexes, des dépassements d’honoraires ou des délais d’attente trop longs, un manque de temps pour consulter un professionnel de santé.  

Des risques alarmants et des freins à lever 

La vulnérabilité financière des femmes constitue un facteur d’exclusion sociale, auquel s’ajoutent diverses problématiques de santé. Ainsi, selon le dernier rapport du ministère de l’Égalité femmes-hommes, les femmes habitant dans les quartiers populaires de la ville souffrent davantage d’obésité et de surpoids. Elles ont plus de risques de développer de l’hypertension, du diabète, des maladies cardiaques, des accidents vasculaires cérébraux… D’ailleurs, le décès prématuré lié à des maladies cérébro et cardio-vasculaire est trois fois supérieur en moyenne chez les ouvrières, plus souvent consommatrices de tabac et d’alcool, que chez les femmes cadres et de professions intermédiaires. Les femmes vulnérables travaillent souvent dans des environnements de travail pénibles et stressants, sont moins regardantes sur leur alimentation et n’ont pas les moyens ni le temps de pratiquer une activité sportive. Avec un quotidien souvent pesant, marqué par la responsabilité de l’organisation de la maison et de l’éducation des enfants en plus de leur travail, elles ont tendance à ajourner leurs rendez-vous médicaux. Enfin, ne bénéficiant pas d’un suivi gynécologique régulier, elles sont plus sujettes aux grossesses à risque et échappent aux dépistages du cancer du sein et du col de l’utérus. Notons que parmi les femmes en situation de précarité, celles en situation de handicap, celles résidant dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville et les territoires ruraux, sont les plus mal loties. 

Le saviez vous ?

La précarité hygiénique et plus précisément menstruelle représente un véritable fléau chez les femmes les plus vulnérables, comme le souligne une étude menée par l’IFOP et l’Association Dons Solidaires. Elle révèle que 8 % des Françaises, soit 1,7 million de femmes, ne disposent pas de suffisamment de protections hygiéniques. Un chiffre qui s’élève à 38 % pour les bénéficiaires de l'aide associative. Plus d’un tiers ne change pas suffisamment de protection ou a recours à du papier toilette ou d’autres alternatives. Les plus jeunes renoncent parfois à sortir ou à aller en cours à cause de cette situation. 

Des solutions à déployer 

Dans son rapport « sexe, genre et santé » de décembre 2020, la Haute Autorité de Santé plaidait pour une prise de conscience collective, pour éviter d’aggraver les inégalités en santé. Elle a notamment lancé une campagne de sensibilisation sur les réseaux sociaux « Impulsons le changement : stop aux idées reçues » pour faire la chasse à certains a priori. Par exemple : « le VIH est une maladie d’homme. Faux : Les femmes sont aussi touchées par le VIH. Elles y sont même plus vulnérables que les hommes. » 

Des innovations réglementaires 

De nouvelles mesures ont été prises pour renforcer l’accès à la contraception. Depuis le début 2022, avec la carte vitale, les femmes de moins de 25 ans peuvent gratuitement recevoir certains contraceptifs. Et depuis janvier 2023, toutes les femmes peuvent bénéficier, sans aucune condition ni aucun frais, de la pilule du lendemain. Quant à l’IVG, la loi du 2 mars 2022 allonge le délai de recours de 12 à 14 semaines.

Des actions concrètes sur le terrain 

En 2018, le Samu Social de Paris a lancé plusieurs initiatives pour les femmes sans domicile, afin qu’elles souffrent moins de précarité menstruelle. Le CROUS et des associations étudiantes veillent à la mise en place, décidée par le gouvernement, de distributeurs gratuits de protections hygiéniques dans les universités et résidences universitaires.  Autre action importante, la sensibilisation croissante autour des infarctus du myocarde chez les femmes. Rappelons que les maladies cardiovasculaires sont devenues la première cause de mortalité chez les femmes, les plus jeunes n’étant pas épargnées. Cette hausse des infarctus s’explique en partie par l’association entre pilule et tabac, surpoids et obésité, stress et sédentarité. 

Focus sur FemTech France, une association dédiée à la santé des femmes

FemTech France se consacre à l’aide à la création et au déploiement de projets innovants dans le domaine de la santé des femmes. Elle propose, par exemple, une formation dédiée aux entrepreneurs et entrepreneuses qui créent des startups sur des sujets tels que le suivi du cycle menstruel, le diagnostic de l’endométriose, la reconstitution mammaire de femmes ayant subi une ablation d’un sein suite à un cancer…

Le 8 mars prochain, à l’occasion de la journée internationale de lutte pour les droits des femmes, associations militantes et gouvernement s’allient pour faire le point sur les droits des femmes. Placé sous le thème de l’innovation et des technologies pour l’égalité des sexes, l’accès à la santé, aux droits sociaux et politiques sera notamment à l’ordre du jour !
Si les pouvoirs publics ont, semble-t-il, pris la mesure des inégalités d’accès aux soins pour les femmes précaires, il reste encore beaucoup de chemin pour une réelle prise de conscience sociétale avec des effets concrets et mesurables.

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